Tannerre en Puisaye

Un peu de géographie.

D’une superficie de 2983 hectares la commune de Tannerre est traversée du Sud-est au Nord-Ouest par une rivière poissonneuse le Branlin. Celui-ci a pris sa source près de Saint en Puisaye, a traversé Mézilles et ira ensuite se jeter dans l’Ouanne entre Saint Martin et Charny. Il contribue donc à l’alimentation du bassin de la Seine. Sa longueur totale est de 40 Km.

Après le retrait de la mer à la fin de l’ère secondaire (crétacé inférieur – 100 millions d’années) l’argile imperméable et les sables mêlés de silex ont peu à peu recouvert le sol. La végétation s’est développée favorablement et encore aujourd’hui malgré les aléas des défrichements et du remembrement le paysage bocager reste caractéristique.

L’altitude du village proprement dit est de 192 m.

 

Origine du nom.

La forme la plus ancienne (IXe siècle ) est retrouvée dans un missel du diocèse de Sens : « Tanotra »(forme latine).

Dans une chartre du château de Saint-Fargeau datant de 1233 on trouve « Tannodurum »formé à partir de 2 mots gaulois :

On peut donc traduire par « la forteresse de la chènaie » ou « la forteresse de la vallée ».

 

Historique du village

Ø       L’étymologie très ancienne permet aux érudits d’avancer que Tannerre est antérieur à la période d’occupation romaine.
Il est certain que le lieu fut habité bien avant l’époque historique, grâce à sa situation géographique favorable : exposition de la colline regardant vers le midi, vallée défendue par une rivière.

 

Ø       Au cours de la période Gallo-Romaine, Tannerre a été un village industriel très important, dans l’immense ferrier de la garenne on a retrouvé des monnaies, des poteries. (cf. Les Ferriers).
Des tombeaux gallo-romains ont été mis à jour au Nord du village actuel.
En 1900 à la réfection du pont on trouve une chaussée de scories agglomérées in-fendable, vestige d’un passage à gué, qui pu servir d’assises aux nouvelles piles.

Puis après cette période de prospérité, la civilisation recule comme partout en Gaule, sous les poussées des différentes invasions barbares. La forêt gagne sur les cultures et chaque village forme bientôt un îlot parmi les bois.

 

Ø       Au moyen age
La contrée se repeuple, le défricheur ou pionnier paraît quelqu’un d’important qui osait et concevait le projet de remettre de la vie là où elle avait en grande partie disparu.

C’est alors que la féodalité établit ses moyens de défense.

Fossés circulaires ou carrés larges, profonds, sur les hauts des talus, des pieux reliés entre eux par de fortes perches désignant l’enclos appelé « plessis ».

Peu à peu ces mottes s’entourent de murailles, un donjon est construit au centre, lui-même ceint de fossés.

A cette époque Tannerre était défendu par deux de ces mottes.


Ø       Au XIVème siècle Tannerre appartenait à la maison de Courtenay (Cf. un historique de la maison de Courtenay ou la généalogie des courtenay).
La Motte-Champlay et Tannerre relevaient du fief du château de Saint Fargeau.

Les seigneuries de Tannerre et Champlay indépendantes l’une de l’autre comme fiefs mais contiguës et unies dans les mains d’un même maître formaient une importante possession féodale dont Champlay était la force et Tannerre la richesse.

Champlay.
Son territoire n’excédait pas 150 arpents, mais au centre de ce domaine s’élevait une puissante forteresse composée de deux forts et d’un fortin, entourés de fossés et ne communicant entre eux que par des travaux souterrains ; le surplus de l’enceinte était occupée par des casernes couvertes en ardoises et une basse-cour.

Tannerre.
Le domaine de Tannerre était considérable. Il consistait en un manoir seigneurial, en jardins, garennes, moulins et foulons, 6 étangs, environ 50 arpents de bois et 25 arpents de prairies, un grand nombre de masures et métairies exploitant près de deux milles arpents de terre, en 6 fiefs dont 5 avaient droits de haute justice.
Un des plus important, le « fief de vacheresse » (c’est sur ces terres que fut bâti plus tard le hameau des « cottés » était assez important pour avoir eu de fait une prévôté et une justice particulière relevant du bailliage de Champignelles.
Le domaine de Tannerre avait droit de justice, haute, moyenne et basse, avec prison, gibet patibulaire à pendre et peine de mort corporelle ; droit de banalité de moulin, de four, de pressoir, droit de foires et marchés, de poids et mesures, de pêche, de garenne t de colombier, de péage, d’épave et de forfaiture.
Le seigneur avait aussi droit particulier de faire visiter toutes les bêtes tuées à la boucherie pour en avoir les langues, et de prélever pour cause de souveraineté, une gerbe sur cent des blés et des grains appartenant à la cure du lieu.
Tannerre possédait à l’époque une maladrerie et un hôpital.

Tels étaient Tannerre et la Motte-Champlay quand l’armée anglaise s’en approcha en 1359. Ce fut le premier obstacle qu’elle eut à vaincre pour s’ouvrir les portes de l’auxerrois.
Knowles s’empara de la Motte-Champlay et l’occupa militairement. Il plaça son camp en un lieu appelé la « garenne du mouton ».
La maison-fort, ne pouvant offrir une sérieuse résistance, fût occupée par les anglais en même temps que la forteresse et détruite ainsi que le village.
Tannerre mit près de 2 siècles à se relever de ses ruines.

Ø       Vers la fin du XVème siècle, Jacques Dupé succéda à Gaspard Bureau comme seigneur de Tannerre. Son premier soin fût de rendre au village, autant que possible, les garanties de sécurité que lui donnaient autrefois la Motte-Champlay.
Un nouveau système de défense adopté avec les ressources du seigneur et de ses vassaux, consistait en une enceinte continue de fossés, interrompue seulement par deux portes, l’une à l’est, l’autre à l’ouest.
Il fit reconstruire la Maison-Fort.
Une partie de l’église était restée debout, elle fût réparée et complétée par la reconstruction du cœur et du clocher.
Jacques Dupé mourut en 1530.

Sources : Histoire du comté de Saint Fargeau

A. Dey

Le Château

Ø       Tous les seigneurs de TANNERRE au XIII et XIV e siècle sont de la famille DE COURTENAY. En 1417, la terre appartient à Jean DE COURTENAY par donation litigieuse, il céda ses droits à Gaspard BUREAU, un des plus illustres seigneurs de Tannerre. Capitaine de Poissy et du château du Louvre. Nommé maître d’artillerie, il se distingue à la prise de Bayeux, au siège de Bayonne et à la bataille de Castille. Nommé chevalier en 1464, il meurt en 1530.

Ø       En 1469 Tannerre passe à Jacques DUPE. Il fit reconstruire la maison -fort détruite pendant la guerre de cent ans. Le château était entouré de fossés remplis d’eau, avec cour, basse-cour, potager, colombier, le tout ceint de murs, une allée de grands tilleuls conduisait à l’église, à l’entrée de cette allée, une maison de bois avec croix de saint André existant encore.. A sa mort en 1530 son fils Pierre de DUPE lui succède.
Edmé DUPE baron de Tannerre, descendant de la famille s’illustra comme capitaine d’Henry IV. C’est en particulier lui qui est à l’origine de la rédition d’Auxerre. Le célèbre capitaine de Tannerre est assassiné dans un guet - apens le 23 mai 1594. A partir de cette date Tannerre continue à porter le titre de baronnie. Eustache de TANNERRE son fils prend le titre de baron, il est chevalier en 1609 et enseigne de la compagnie des gardes de Monsieur en 1613. Il meurt en 1631.

Ø       A partir de 1645, il appartient à Jean Henri de LA SALLE puis en 1645 à son fils Roger de LA SALLE qui est écuyer du Roi.
Le parc était accueillent et le baron aimait y donner des fêtes en plein- air.

C’était un dimanche de juin, le bal battait son plein, il fut surpris, n’ayant pas lancé d’invitation de voir arriver Mademoiselle Anne –Marie Louise d’ORLEANS duchesse de MONTPENSIER alors exilée au château de St Fargeau accompagnée de son marmiton- musicien Lully. Elle aimait les réjouissances.
Claude PEZIER garçon du peuple avait fait le pari avec un groupe de jeunes gens du pays de danser avec la courtisane du roi, il était jeune, beau, de mine fière quoique modestement vêtu et très respectueux. Il invita, Mademoiselle accepta, la danse terminée, la princesse s’informant du nom de ce galant cavalier entra dans une colère terrible quand elle apprit avoir dansé avec un manant. Elle exigea un châtiment exemplaire. Monsieur de LA SALLE intervint, faisant état de la jeunesse du paysan téméraire, son attitude de profonde déférence dont il ne s’était pas départi, on décida que Claude PEZIER paierait l’amende énorme pour lui de cent écus. Les parents, de l’audacieux durent vendre une paire de bœufs pour acquitter la dette.
Quant au jeune manant, il prit la chose gaiement car il doit être bien sûr, le seul paysan de France qui ait dansé avec la cousine du roi

A partir de cette date la terre et le château changea fréquemment de maître, on peut citer :

 

Ø       Henri MALLET écuyer, Nicolas DE BOINVILLERS, François Pierre Louis DES BARRES conseiller du Roi au début du XVIIIe siècle, Charles Edmé DE BERTHELON DE LA VILLERNAY commissaire principal des guerres, Benigme LE RAGON DE BRETONVILLIERS en 1733 maréchal de camp des armées du roi , Pierre Justimien VIDEL en 1791 notaire à Paris, les frères MALLET bourgeois de Genève et banquiers en 1793.

 

Ø       Les 23 thermidors an XII, ( 11août 1804) Etienne TOURNYOL DE LA RODE rachète la terre de Champlay-Tannerre pour 151.000 francs. Il possédera le château entouré de fossés, cour, basse cour, la ferme... les métairies, le Mouton, Les assises, Le lieu Gros, Le ferrier, Beauregard. Il fait détruire le château en préservant une partie du fort, pour reconstruire un château au même emplacement. Le nouveau château avec des façades de pierres blanches et de briques roses, des toitures en ardoises est entouré de douves. Il construisit une chapelle. Maire de Tannerre député de l’Yonne chevalier de l’ordre royal et militaire de St Louis, il meurt en 1855 à 97 ans, son corps repose dans la chapelle.

 

Ø       La famille de LESTRADE s’installe à Tannerre par le mariage le 15/05/1821 de Odon de LESTRADE avec Claire TOURNYOL DE LA RODE. Claire meurt en 1865, Odon en 1873 leurs corps reposent à la chapelle. Suzanne DE LESTRADE épouse Charles de FAUBOURNET de MONTFERRAND, leurs fils Xavier épouse Jehanne d’ASTORG. Ils auront deux fils Charles et Hubert. Ce dernier vendra après la guerre de 1914, la propriété à

 

Ø       La famille COMMERGNAT, descendante de l’architecte qui avait établi les plans. Il fut revendu en 1962 à l’association des Forces Vives ( service de culture et d’orientation pour adolescents)

 

Ø       En 1966, la ville de Vitry sur Seine en fit à son tour l’acquisition pour en faire une colonie de vacances. Le 2 mai 1978, il est détruit par un incendie, jetant la consternation parmi les habitants et fut rasé au mois d’août de la même année. Il ne reste aujourd’hui que son emplacement, les douves, le parc et les échos des ébats joyeux des enfants. Des locaux modernes bordant le chemin du Parc ont été construit pour y recevoir les jeunes vacanciers.

 

La Chapelle

 

Edifiée par Etienne TOURNYOL DE LA RODE à quelques centaines de mètres de la face principale du château, elle est située à droite de l’entrée du cimetière. Elle abrite les sépultures des familles TOURNYOL DE LA RODE et DE LESTRADE.

L’église

 

Ø       Descriptif

 

-          Plan rectangulaire

-          Une nef du XIIe siècle

-          Longueur 39,22 m

-          Largeur à la nef : 9,70m

-          Hauteur de la voûte à la nef 10m

-          Hauteur du sanctuaire 11,75m

-          Extérieur flanqué d’énormes contre forts

 

Ø       Histoire

 

-          les murs de la nef, les éperons soutenant les murs, les petites fenêtres à plein cintre et le portail intérieur datent du XIIe siècle

-          détruite avec le village pendant la guerre de cent ans, l’église est restaurée et reconstruite par le seigneur Jacques DUPE

-          Le nouveau clocher est édifié contre la façade ouest, l’extérieur flanqué d’énormes contre-fors sert de porche et de défense (murs épais, 3 meurtrières, tour carrée à cheval sur le porche).

-          Elle est de nouveau restaurée en 1888 sur l’initiative de son curé l’abbé FONDRAS. Les voûtes de bois sont remplacées par des voûtes de pierre reposant sur des arcades ogivales.

-          Le 6 juin 1740 a lieu la bénédiction de la chapelle St Lazare de Tannerre

 

Ø       Mobilier

 

-          Sous le porche :

-          Une jolie tête sculptée de st Roch

-          Des fragments de pierre tombale

-          Une sculpture mutilée, pièce peinte avec une inscription détruite ( résurrection de st Lazare)

-          Une vierge sur fleuron sur voûte de bois

-          A l'intérieur :

-          Un St Martin équestre

-          Un St MARTIN évêque

-          Une vierge de type bourguignon

-          A droite une vierge de Fatima

 

-          Les statues de St Joseph (à droite) et de la vierge Marie (à gauche) sont portées par des consoles de bois, ce sont des pendentifs provenant de l’ancienne charpente, ornés des écussons des familles de Tannerre. Un écusson avec trois lions ( famille DUPE), écusson avec trois glands sur fond azur ( famille de THOISY épouse d’Edmée DUPE)

 

-          Un autel de bois peint et doré avec tabernacle et gradin de bois

-          Un banc de célébrant simple à 3 places ( époque Louis XV)

-          Autres bancs du XV et XVI siècles avec panneaux ornés de « serviettes »

-          Deux belles chasses en bois doré renfermant les reliques de st Claude st Firme st Ange venant des catacombes de st Pontien à Rome rapportés à Tannerre en 1694 par Jacques Greslin, habitant de Tannerre. Il serait le sculpteur et l’ébéniste des chasses et de l’autel en bois doré. Il meurt en 1714.

-          Les reliquaires cachés pendant la révolution dans un grenier à foin furent restaurés en 1857 par Monsieur DE LESTRADE. ON fêtait solennellement les reliques le quatrième dimanche après Paques.

-          l'autel de la Vierge

-          Ste Marie entourée de Ste Thérèse et de Jeanne d’Arc

-          Une plaque de marbre de la famille D’ESGRIGNY portant les inscriptions « amour et reconnaissance o marie protégez-nous toujours »

-          Une autre plaque « en reconnaissance des libéralités faites pour la reconstruction de l’église  François Basile COQUELLAT »

-          Une petite porte du XVIe siècle formant une arcade en talon

-          Une plaque de marbre à la mémoire de tous les tués pendant la guerre 1914,1918 offerte par la famille DE LESTRADE

 

Ø       Les vitraux

 

-          baptême d jésus dans le Jourdain

-          Ste Marguerite et st Hubert

-          Ste Madeleine et St Henri

-          Ste Françoise et St Jean

-          Résurrection de st Lazare ( rosace de la tribune a 6 pétales)

-          St Colombe et st Eloi

-          Stes Rosalie et Marguerite

-          Jésus et St Martin ( en médaillon l’abbé FONDRAS)

-          Ste Jeanne d’Arc et st Louis

-          Ste Adeline et st Germain

-          Ste Suzanne et st Charles de BARONEE

-          Ste Anne et St Joachim

-          Ste Rosalie et st Séverin

 

Ces vitraux ont été offerts par les familles : DE LESTRADE, D’ESGRIGNY, DE CONFLANS, FAUBOURNET, COMMERGNAT et financés par une souscription.

 

L’école

 

Depuis 1833, la loi Guizot oblige les communes à entretenir une école primaire.

 

Ø       Les archives de Tannerre indiquent qu’en 1876, le conseil municipal décide la construction d’un bâtiment « mairie – école » car la location de la maison qui jusque là faisait fonction d’école arrive à son terme ( maison de Monsieur MARTIN)

 

Ø       Plusieurs généreux tannerrois donnèrent l’autorisation d’exploiter gratuitement les pierres de leurs propriétés pour la construction du bâtiment. En 1879 ( année inscrite au fronton de la mairie) le conseil municipal en accord avec le curé recensait 29 garçons et 20 filles comme élèves gratuit c’est à dire de famille pauvre. Les plus aisés devaient payer leurs études.

 

Ø       En 1882, les lois Jules FERRY sous la IIIe République imposent la gratuité et l’obligation de l’enseignement.

 

Ø       Un agrandissement de l’école devenue nécessaire est entrepris avant 1914, mais la guerre interrompt les travaux qui ne seront achevés q’en 1958.

 

Ø       L’effectif atteint son maximum entre les années 1920/1940 avec 47 filles et 45 garçons

 

Ø       En 1958, le nombre d’enfants n’est plus suffisant pour ouvrir une école maternelle comme c’est souhaité et Tannerre reste avec ses deux classes primaires.

 

Ø       En 1973 un regroupement pédagogique se met en place avec les communes de Villeneuve Les Genets et Saint Prive. Malgré cela cruellement frappé par l’exode rural, Tannerre verra une classe se fermer en 1978 et l’autre en 1983.

 

Les locaux sont alors affectés à des associations.

Des tannerrois célèbres

 

Ø       Edmée CARREAU

 

Né le 8 ventose an VII ( 27 février 1799), décédé le 4 janvier 1871

Il fut député de l’assemblée constituante de 1848

Maire de Tannerre de 1870 à 1871 et fondateur du bureau de bienfaisance

« je veux que le produit des bois que je lègue au bureau de bienfaisance soit spécialement et uniquement employé à secourir les indigents de la commune de Tannerre sans distinction de croyance ou d’opinion politique ou religieuse et sans autre considération que le degré d’indigence et l’urgence des besoins » (extrait de son testament du 7 novembre 1869)

Il  léguera à la commune :

-          le bois pointu 198,21 ares

-          les grands genièvres 981,20 ares

-          le bois st Lazare 275,29 ares

-          le Vilmarin 290,40 ares

-          une somme de 3000 francs or pour la construction d’un lavoir

-          2000 francs or pour l’acquisition d’une horloge

La rue principale de Tannerre porte son nom et son portrait est dans la salle de la mairie.

Edmé CARREAU repose avec sa famille dans le cimetière de Tannerre.

 

Ø       Alcide CHAPEAU

 

Né le 25 novembre 1848, décédé en 1927

Alcide sabotier de métier écrivit de nombreux poèmes populaires, des charades et des énigmes dans les revues de l’époque.

Il repose en famille ( famille CHAPEAU- GAUDET) dans le cimetière de Tannerre

 

 

« Histoire contemporaine du village »

 

Texte extrait du recueil « Si Tannerre m’était conté » écrit par l’Amicale des Aînés de Tannerre «  L’Espoir Tannerrois » en décembre 1995

 

Ø       La fin du XIXe siècle

 

La guerre de 1870 apporte, comme partout bien des contraintes aux tannerrois. On doit entretenir une garde nationale sédentaire et supporter les réquisitions.

La fin du siècle est marquée par l’importante restauration de l’église. La nouvelle école est prête en 1879. L’ouverture d’un bureau de poste est demandée en 1885 ; il sera tout d’abord installé chez Monsieur ROLAND.

Au nord de l’église, la destruction du presbytère, maison insalubre et la création de la place sont décidées dés 1894.

Le puits public est creusé à  l’angle du jardin du presbytère (aujourd’hui sur la place, il reste la pompe).

Les lavoirs publics sont construits

 

Ø       Le début du XXe siècle

 

On entreprend d’agrandir l’école, on construit le nouveau pont (1902), l’ancien ne comportant qu’une voie unique.

La poste est transférée en 1916 au 5 rue st Blaise.

La population entretient de bons rapports avec les châtelains ( la famille DELESTRADE) qui s’implique dans la vie de la commune, apporte aideet soutient aux indigents.

Les activités du château fournissent de nombreux emplois : gardes, jardiniers, palefreniers, ouvriers, blanchisseuses, lingères, femme de chambre, cuisinières...

Les jours de chasse, les volontaires sont employés comme rabatteurs et à la fin de l a journée, les pièces de gibier sont partagées.

La guerre vient bouleverser cette vie tranquille et laborieuse. Les hommes absents, les femmes doivent travailler doublement. Toute la jeunesse se trouve fauchée, 31 morts pour 838 habitants soit près de 4% de la population, privant le village de son travail et de sa descendance.

La paix revenue, les châtelains sont contraints de vendre et le jour des enchères bon nombre de tannerrois essuient ses larmes en cachette.

 

Ø       L’entre deux guerres

 

Et puis, sans pour cela oublier les malheurs, la vie reprend son cours au rythme des travaux des champs.

L’automne et ses labours, le ramassage des noix et des pommes à cidre, les semailles, les « bouchues à assarter », les foins, la « mouesson », le battage.

Les femmes s’occupent des bêtes : volailles, lapins, vaches et produits laitiers et vendent leur production au « vollailleux » ou au marché de Toucy. Il faut alors payer un droit (l’octroi). On laisse voiture et cheval dans les auberges aux portes de Toucy avant de vaquer à ses affaires.

On fait encore le pain dans les fermes, une fois par semaine, on le pétrit dams la maie.

Ce sont aussi les femmes, qui récoltent et préparent les plantes qui serviront aux soins :

-          la feuille de ronce

-          les fleurs de lys

-          le tilleul

-          la camomille

-          la verveine

-          la bourrache

Dans les cas graves, on fait appel au docteur MELANOFF de Champignelles. Ce praticien accouche avec dextérités toutes les femmes du village, réduit les fractures et pratique même les appendicites d’urgence. Le docteur DELOGE lui succède vers 1936.

 

L’entraide entre les habitants est spontanée. Il est d’usage que les cultivateurs se ‘donnent un coup de main’ et les grands travaux tels la fin des moissons et le battage sont l’occasion de se réunir autour d’une bonne table. D’autres, plus pingres en profitent pour « écouler » les vieux lapins, les vieilles poules et la feuillette de cidre presque vinaigre ! ! ! !

On se retrouve aux traditionnelles veillées pour casser les noix avant de déguster la tarte aux pommes. Les châtaignes et le cidre du « patron ». Les activités ne sont pas seulement agricoles. Nombreux sont les commerçants et les artisans.

Les ferriers sont exploités de façon intensive, des ouvriers belges, italiens puis serbes sont embauchés pour l’extraction.

Les bois sont exploités de la façon la plus rentable possible, pour les grumes bien sûr mais aussi pour le branchage qui est coupé en moulée, en charbonnette, en bourrées. Le bois sert entre autre aux étais de mines et aux traverses de chemin de fer.

Au mois d’avril mai lors de la montée de la sève on écorce les chênes et on envoie la production au moulin à Tannerre. Les charbonniers utilisent sur place la charbonnette pour la fabrication du charbon de bois.

 

Le goût de la fête est bien vivace comme le montre ce concert du 23 avril 1992 où la jeunesse tannerroise présente un programme fort complet de chansons et de poésies.

Le dimanche on danse à la demande, au son du piano mécanique dans la salle du café COUTELIER. Pour les grandes occasions, quelques musiciens prennent place sur une estrade sur élevée à laquelle ils accèdent par une petite échelle. De temps en temps des projections de cinéma muet ont lieu en plein air sur la place de l’église.

Plus rarement des petits cirques choisissent Tannerre pour faire halte et donner un spectacle. Les jours de fêtes patronales (4e dimanche après Pacques pour les « reliques » et 1e dimanche d’octobre) les forains envahissent le village. Sur la grande place, on dresse un « parquet » pour le bal et divers manèges s’installent : les pousse-pousse, le globe de la mort ( il s’agit de motos tournant dans un globe).Dans les rues avoisinantes, de multiples jeux prennent place : bobèches, loterie, tir à la carabine. La confiserie VASCONI fabrique ses berlingots réputés devant les yeux émerveillés et gourmands des badauds ; Une odeur délicieuse envahit le village. La maison « VIOLETTE » présente elle aussi ses spécialités. La fête dure trois jours, le lundi, les commerçants ont l’habitude de s’y retrouver et à la sortie de l’école les enfants bénéficient d’un tour de manège gratuit offert par la municipalité. Certaines années, des cavalcades sont organisées : c’est ainsi qu’en 1939 l’un des chars représentait les accords de Munich.

 

L’électrification du village et des bâtiments communaux est réalisée à partir de 1929.

Les automobiles font leur apparition : quelques commerçants et bien sûr le nouveau propriétaire du château Monsieur COMMERGNAT utilisent ce nouveau moyen de transport mais le cheval et le vélo restent les rois. Une navette d’autocar quotidienne ( les cars MOUTON) assure la liaison CHAMPIGNELLES-TOUCY via TANNERRE.

 

Ø       1939/1945

 

De nouveaux nuages s’amoncellent sur le ciel de l’Europe : l’extrême droite prend le pouvoir en Italie, Espagne et Allemagne, la barbarie fasciste s’abat sur notre pays.

Après la « drôle de guerre » la cinquième colonne pousse une bonne partie des tannerrois à un bref exode. Quand ils reviennent, les habitants ne peuvent que constater les vols e les pillages commis par d’autre français.

La Wehrmacht occupe le château quelques temps. Les rapports avec l’ennemi sont supportables, les autorités allemandes, encombrés d’une multitude de prisonniers français les placent comme ouvriers dans les fermes sous la responsabilité du maire. Firmin DELAMOUR. Chaque semaine, ils doivent venir en mairie témoigner de leur présence. Ils ne restent que quelques mois et s’évadent presque tous surtout à partir du moment où il est question de les transférer en Allemagne (fin 1940).

La RESISTANCE ne commet pas à Tannerre d’action spectaculaire mais plusieurs enfants du pays ont le courage de s’impliquer dans le combat de l’ombre. De lourdes réquisitions pèsent sur les producteurs. Toutes les denrées sont rationnées. Malgré cela, on s’efforce d’envoyer des colis aux prisonniers pour lesquels on fait tricoter des chaussettes et des passe-montagnes aux jeunes filles.

En 1944, les allemands harcelés se replient et deviennent agressifs. Un groupe de jeunes tannerrois pris en otage, sert même de « bouclier humain » à une colonne en déroute. Tous seront heureusement libérés sur la route de Villiers.

 

Ø       L’après- guerre

 

Après la guerre, l’exode rural s’accentue avec la dénatalité, la mécanisation et l’agrandissement des exploitations agricoles. Malgré tout, petit à petit Tannerre se modernise : Les routes sont renforcées avec les ferriers ou avec le silex tiré de la carrière de la route de Champignelles ( Messieurs MORO et DELAGOUTTE extrayaient alors les cailloux à la main en 1949) puis les chemins sont peu à peu goudronnés.

Le château d’eau permet à chacun d’avoir l’eau sous pression. Les salles de bain apparaissent, les lave- linges se multiplient condamnant le beau lavoir et les lessiveuses à l’abandon.

La 1er télévision est acquise par M LOFFROY qui en fait profiter largement ses concitoyens. Le gaz en bouteille supplante le charbon de bois et les traditionnels fourneaux.

De merveilleuses fêtes restent dans les souvenirs. En 1954, la fête des fleurs est animée par la fanfare des établissements GUILLETet COMMERGNAT dans le cadre prestigieux du château. Son bénéfice aidera à financer la réfection de la toiture de l’église.

 

Grâce à la personnalité de Marie ROLAND fille de l’ancien régisseur du château sous les châtelains DE LESTRADE ( elle organisait le catéchisme en compagnie de Mademoiselle SAUVAGE), les fêtes religieuses sont magnifiées, la plus grandiose fut la plus émouvante fut sans nul doute la procession de NOTRE DAME de FATIMA. Une statue de la vierge venant de Fatima (Portugal) a été offerte à la paroisse de Tannerre en 1957. Son installation dans l’église donna lieu à une grande cérémonie à laquelle participait l’évêque de Sens et le révérend père RIQUET. Une procession avec cierges et chants religieux eut lieu la veille dans les rues du village. Le dimanche, le cortège partit de la ferme de BEAUREGARD. La statue fut installée sur un chariot fleuri, décoré de lierre et drapé de blanc, qui était tiré à bras d’hommes. Elle était précédée par les enfants du village qui habillés de blanc, le front ceint d’une fine couronne, marchaient sur deux rangs, les mains jointes. Les enfants de Marie, jeunes filles vêtues de robes longues blanches et bleues, fermaient le cortège. Après avoir traversé le village, la procession et la foule qui suivait entrèrent dans l’église pour une cérémonie grandiose. La statue prit alors sa place définitive sur l’autel qu’on lui avait préparé coté droit dans le cœur de l’église ( sur le coté une plaque déposée en remerciement est signée M.R).

 

Ø       La fin du 20e siècle

 

Il devient difficile de lutter contre le déclin des campagnes :

-          le château disparaît dans l’incendie de mai 1978

-          l’école est définitivement fermée en 1983

-          les derniers artisans cessent leur activité Raymond PIMOLLE en 1982, Pierre CARROUET en 1990

-          la dernière épicerie en 1989

-          le dépôt de pain qui remplaçait la boulangerie depuis 1984 ferme en 1992 (note de l’auteur : un dépôt de pain a été réouvert en 1994, puis de nouveau fermé en 2005)

-          le bureau de poste est transformé en simple agence en 1991, puis remplacé par un point poste en 2005.

-          la scierie a cessé son activité ( note de l’auteur : un gîte y a été ouvert).

 

A partir de 1960, une autre forme de population se développe : les résidences secondaires

Proche de Paris, Tannerre attire les citadins qui, ayant ou non des racines au village, viennent profiter de l’air de la campagne pour le week-end, les vacances et parfois même la retraite : le plus connu d’entre eux est sans doute Monsieur J.P SOISSON qui résida quelque temps à LA LOGE au GUE.

 

Le centre de vacances de VITRY SUR SEINE a reconstruit ses bâtiments dans le parc du château. Il offre quelques emplois et apporte au moment des vacances les éclats de rire et les chants des enfants.

Grande cité sidérurgique au début de l’ère chrétienne, Tannerre a ensuite au cours des siècles gardé sa vocation de petit village de polyculture et d’élevage. De nos jours, le monde agricole s’adapte en diversifiant ses productions : céréales, colza, cynorhodon (églantier), bovins, moutons, chèvres, cerfs.

 

Par leur activité, le café -hotel -restaurant de Madame BARBAULT, le garage de Monsieur BARBAULT, le centre équestre de la ferme de BeauRegard, les chambre d'hotes contribuent chacun à leur manière au maintien de la vie au village.

Les associations du village et leurs bénévoles continuent d’assurer les animations et organisent avec le même dévouement kermesses, repas, jeux, promenades, voyages, concerts, rencontres sportives ( note de l’auteur et même un vide grenier le 15 août).

On tâche maintenant d’améliorer la qualité  de la vie, le réseau d’assainissement est en cours d’installation, les équipements sportifs, l’illumination de l’église et le fleurissement de notre petite cité sont là pour témoigner des efforts réalisés : ce n’est pas sans un brin de coquetterie que Tannerre s’apprête à entrer dans le 3e millénaire.



Cette page est extraite du fasicule "Si Tannerre m'était comté..."